Tu es toujours assis parmi nous

Texte choisi et lu par Isabelle au cimetière

« Tu es toujours assis parmi nous, frère, ta personne garde son aspect habituel et demeure pareille aux nôtres, sans manifester d’autre défaillance que ta perte du pouvoir d’action. 

Mais où ce souffle est-il parti, qui voilà quelques heures envoyait un soupir au Grand Esprit ? 

Pourquoi demeurent-elles silencieuses, ces lèvres qui naguère nous livraient leur langage puissant et expressif ? 

Pourquoi sont-ils immobiles, ces pieds qui, il n’y a pas si longtemps, étaient plus lestes que le daim dans ces montagnes ? 

Pourquoi pendent-ils vainement, ces bras qui pouvaient grimper sur le plus haut des arbres, ou tendre le plus inflexible des arcs ? 

Hélas! chaque partie de ce corps, que nous regardions récemment avec admiration et étonnement est maintenant devenue aussi inanimée que si elle datait de trois cents hivers. 

Nous n’allons pas, cependant te pleurer comme si tu étais à jamais perdu pour nous, ou comme si ton nom devait être enfoui dans l’oubli; ton âme continue à vivre dans le vaste pays des esprits, avec ceux de ta nation partis avant toi, et quoique nous restions à l’arrière pour perpétuer ton renom, un jour nous te rejoindrons. 

Animés par le respect que nous te portions de ton vivant, nous venons t’offrir un dernier témoignage d’amitié qu’il est en notre pouvoir de te donner afin que ton corps ne gise pas abandonné dans la plaine, qu’il ne devienne pas la proie des bêtes des champs ou des oiseaux des airs, nous prendrons soin de le faire reposer avec ceux de tes prédécesseurs, partis avant toi, espérant en même temps que ton esprit se nourrira de leurs esprits et sera prêt à recevoir le nôtre quand nous arriverons, nous aussi, au grand Pays des Âmes. »

Hommage funèbre des peuples Sioux, Dakotas, rapporté par l’américain J. Carver dans les années 1766 .

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