A propos de Pierre Tanguy

Jean-Claude Koechlin, adjoint de Pierre à l’IPSN, Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire, a écrit et lu ce texte probablement au moment du départ de Pierre pour EDF en 1985.(1)

J’ai retrouvé ce texte dans la pochette de Pierre où il gardait des documents de sa carrière.

Jean-Claude Koechlin est un collaborateur très proche de Pierre.  Pour l’histoire de leur rencontre et de leur amitié, je vous renvoie au très beau texte de Jean-Claude « Connaissiez-vous vraiment Pierre Tanguy ? ».

Bonne lecture !

(1) la date de 1985 concorde avec les deux faits mentionnés par Jean-Claude ; il mentionne que Pierre a passé 30 ans au CEA, or Pierre a débuté en 1954 sa carrière au CEA, et que Pierre a 4 petits enfants. En 1985 les 4 aînés des petits enfants sont : Priscilla, Aurélie, Romain et Marine née en avril 1984.

J.C KOECHLIN

A PROPOS DE PIERRE TANGUY

Les quelques trente années de la carrière de Pierre TANGUY au CEA ont comporté deux phases distinctes  :

  • Au·cours de la première, de 1954 à 1971, il fut l’un des grands concepteurs des réacteurs graphite gaz dont les derniers survivants alimentent encore les réseaux é1ectriques français et espagnol dans des conditions de fiabilité et d’économie plus qu’honorables.

Dans les années 50, il s’est façonné dans 1e fameux phalanstère de physiciens de réacteurs animé par le regretté Professeur Jacques YVON, puis par Ju1es HOROWITZ. Le service dit de « Physique Mathématique » pratiquait une réelle assurance de qualité avant que le vocable fût inventé ; pour s’en convaincre, il suffit d’évoquer quelques uns des « produits » sortis du même creuset : Michel TROCHERIS, Jean BUSSAC, Pierre BACHER , François COGNE, Robert LATTES, Jean-Claude LENY, Robert DAUTRAY et d’autres.

  • Après cette phase du « bond en avant », vient celle du « garde fou », c’est à dire celle de la sûreté, de 1971 à nos jours. Cette vocation lui· fut instillée subti1emen t par son père spiritue1 Jean BOURGEOIS à la fin des années 60, notamment à l’occasion d’une réunion d’un groupe ad hoc à Saint Laurent des Eaux, où TANGUY déclara à la sortie d’un ton alors goguenard : « Tiens, la sûreté, cela pourrait peut être servir à quelques chose« .

Et depuis, grâce à lui et à beaucoup d’autres, la sûreté nucléaire a vraiment servi à quelque chose, non seulement à l’énergie nucléaire, mais aujourd’hui dans d’autres domaines industriels où sa maîtrise et sa rigueur font figure de modèle.

L’idée maîtresse que TANGUY a défendu avec acharnement et fait prévaloir avec brio en dedans et en dehors de l’héxagone, est que la sécurité industrielle doit préserver la primauté à la connaissance et au jugement techniques, et résister sans faiblesse aux « charmes discrets de 1a  bureaucratie « .

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Lorsqu’on évoque sa personnalité auprès de ceux qui le connaissent bien, un leitmotiv revient toujours :  au-delà de multiples capacités intellectuelles et humaines, sa qualité première est d’avoir DU caractère : agressif disent ceux qu’il a pu parfois heurter, rayonnant disent ceux qu’il a subjugués, joyeux disent ses amis. Nul ne conteste qu’il soit un battant, un décideur, un séducteur et donc un meneur d’hommes. (1)

(1)(NDLR – note manuscrite ajouté par Jean-Claude) Pour ce qui est des femmes, Chantal et Christiane pensent qu’il serait plus mené que meneur.

Son audience internationale est considérable Nuc1eonics Week l’a récemment ainsi défini : « Strong personnality and high visibility « . Doué aussi du sens de l’humour, il s’est demandé alors si la « high visibility » n’était pas le propre de celui qui aime volontiers « se faire voir ». Mais personne n’a été dupe, il s’agit bien en langage américain de celui qui a de la présence.

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Sa vie familiale est placée sous le signe de la ‘bande des quatre » : une seule épouse mais quatre enfants qui lui ont déjà donné quatre petits enfants très beaux dont il est très fier et son ambition est d’initier au bridge au moins quatre arrière-petits enfants. Il est en effet un excellent joueur de bridge et y a consacré la majeure partie de son temps à l’Ecole Polytechnique, raison majeure, dit-on, de sa surprenante absence dans le corps des mines.

Grand sportif, il n’a pratiqué rien moins que le tennis, le ski, l’escrime (international militaire à l’épée), le surf, la chasse, le golf et le cross – et toujours avec un subtil dosage de hargne et d’élégance propre au gagneur.

L’exploit dont il tire la plus grande fierté est sa performance récente dans le marathon de New York où il a battu JCK … non pas son ex-adjoint car il est bien trivial au CEA de battre son adjoint dans tous les sens du terme. Le JCK qu ‘ i1 a battu, c’est l’autre, Jean-Claude KILLY. On croit savoir à l’IPSN que KILLY lui aurait proposé une revanche à Val d’Isère sur la piste Super S de Solaise et que TANGUY se serait accordé un délai de réflexion pour consulter. Il se serait adressé à son consultant favori, le mouvement Greenpeace qui lui aurait répondu que sa seule chance de battre KILLY sur les pentes de Val d’Isère serait de farter ses skis à 1 ‘hexafluorure d’uranium …

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Dans un tout autre domaine, une anecdote sur sa force de riposte à l’adversité et ses capacités intellectuelles : devant faire un exposé sur la sûreté des réacteurs rapides à Bruxelles dans le cadre du Conseil de l’Europe, il est parti en oubliant le texte laborieusement préparé par ses collaborateurs. Il a rédigé alors un nouveau texte dans le Trans Europ Express et a prononcé l’un des exposés les plus clairs et brillants de sa carrière, exposé qui tient toujours lieu de référence à l’IPSN.

Jean-Claude Koechlin,
lu probablement lors de son départ pour EDF

Ci-dessous le texte original de J.C. Koechlin

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