Tchernobyl, la loyauté de la parole – Partie 1

Tchernobyl – 26 avril 1986

Beaucoup d’éléments sur Tchernobyl et en lien avec notre père Pierre Tanguy. Ma génération croit connaître cette histoire, nous nous rappelons de notre père à la télévision et du pari qu’il a gagné avec les canards sauvages ! Mes enfants ne connaissent cette catastrophe que de nom.

J’intitule cet article « la loyauté de la parole ». N’est-ce pas ce que nous nous demandons tous ? Nous ont-ils dit la vérité ? Même si il s’agit de notre père, qui dit la vérité les partisans du nucléaire ou les anti ?

Pour commencer une citation de Papa, elle provient de son livre « Nucléaire pas de Panique ».

« C’est une hardiesse dangereuse et de conséquence, outre l’absurde témérité qu’elle traîne quant et soy de mespriser ce que nous ne concevons pas ». Montaigne, Essais

Et cette citation que j’ai choisie.

« Le danger, ce n’est pas ce que l’on ignore ; c’est ce que l’on tient pour certain et qui ne l’est pas». Mark Twain

Allons à la rencontre des faits et tâchons d’y voir plus clair. Et n’oubliez pas, vous pouvez contribuer en donnant votre avis dans les commentaires….

Pour faire cet article, j’ai regardé les interviews de Pierre à la télévision, lu son livre « Nucléaire pas de Panique« , publié en 1997. J’ai visionné des films sur Tchernobyl, notamment un film « alarmiste » « La bataille de Tchernobyl – Hommage aux liquidateurs » (2006), le reportage diffusé le 26 avril sur Arte « Tchernobyl, Fukushima – vivre avec » (2016). J’ai ainsi découvert des choses qui, en partie, ont modifié ma vision de cette catastrophe unique par son ampleur dans l’histoire du nucléaire, et qui m’ont éclairé aussi sur mon père.

Commet se faire une opinion à partir de points de vue aussi contradictoires ? Que pouvons-nous comprendre 30 ans après? Quel a été l’impact de cette catastrophe sur la réflexion de Pierre ? Voilà quelques unes de mes questions que je veux partager avec vous.
Isabelle

Résumé des faits :

Le samedi 26 avril 1986 à 1 h 30 du matin, un réacteur (le N°4) explose dans la centrale nucléaire soviétique. Cette centrale est située en Ukraine, proche de la Biélorussie. Les soviétiques ne mentionnent pas l’accident immédiatement. Ce sont les suédois qui s’en rendent compte deux jours plus tard par leurs mesures de radioactivité.  Le réacteur en feu a relâché dans l’atmosphère des quantités très importantes de produits radioactifs et il faudra 10 jours pour stopper ces rejets. Pendant toute cette période l’anxiété est grande en Europe, notamment à cause du « nuage radioactif » qui traverse l’Europe.

Ensuite,  les soviétiques mettront plusieurs mois, jusqu’à fin octobre, pour recouvrir d’un sarcophage le réacteur. 600 000 russes ont été mobilisés (on les appelle « les liquidateurs »). En effet à cause des doses de radiation, les personnes ne pouvaient travailler sur le réacteur que quelques minutes. La population immédiate (30 km autour de la centrale, soit 250 000 habitants) est évacuée quelques jours après l’accident. Sont restés dans les zones dites « faiblement » contaminées au delà de ce cercle, 6 millions de personnes. Elles doivent vivre avec la radioactivité. L’anniversaire des 30 ans de Tchernobyl, la semaine dernière, a été l’occasion de diffuser un documentaire sur la vie dans les zones contaminées « Tchernobyl, Fukushima – vivre avec » (Arte, 2016).

Partie 1 : Les médias et combien de morts ? Peut-on manger de la salade et des champignons en France ?  Le professeur Pellerin accusé

Les médias parlent de cet accident à partir du 29 avril.

Le 29 avril ce sont Jean PETIT, adjoint au directeur IPSN (Institut de Protection et de Sûreté Nucléaire du CEA), et François COGNE, directeur IPSN, qui se succèdent sur les plateaux télévision.

Pierre en tant qu’inspecteur général pour la sûreté à EDF intervient sur les plateaux à partir du 30 avril, ci-dessous sur A2 à 20 h, il est interviewé par Noël MAMERE.


Le 30 avril toujours, Pierre est sur le plateau de Soir 3, journal de 23 h sur  FR3. Il est interviewé par la journaliste Geneviève GUICHENEY.


Il y a aussi le professeur Pierre Pellerin, directeur du SCPRI (Service Central de Protection contre les Rayons Ionisants), qui intervient par rapport au risque pour la santé du nuage radioactif. Les experts  français sont rassurants sur les conséquences pour les Français (la radioactivité induite serait sans conséquence disent-ils tous). Par rapport aux conséquences pour les soviétiques, ils n’ont pas plus d’informations que les journalistes mais ils sont unanimes, c’est une catastrophe.

Information ou désinformation ?

Avant de faire ce travail de recherche, j’ai pensé comme la plupart d’entre-vous que nos experts du nucléaire avaient peut-être été volontairement très, trop (?) rassurants sur les conséquences sanitaires pour les Français et que la réalité était différente.

En effet, pourquoi cet écart entre les discours français « vous ne risquez rien » et les réactions d’autres pays européens comme l’Italie, l’Allemagne qui interdisaient la vente de légumes, de lait, … ?  Et cette polémique sur ce nuage qui s’était arrêté soit disant à la frontière … mais qui l’avait dit ?

Alors j’ai cherché.

Peut-on connaître le nombre de morts ?
C’est une question incessante qui revient quand on parle de Tchernobyl. Et en commençant cette enquête, je n’en avais aucune idée.  Combien de soviétiques sont morts à Tchernobyl lors de l’explosion ou des conséquences dans les mois ou années qui ont suivi ? Les chiffres varient de 2 à 2 000 pour les morts lors des premiers jours. Et 20 ans après, de 50 à 900 000 ?!

Le nombre de morts immédiat, celui-ci est le plus facile à établir.

Les médias français ont mentionné dès le 1er jour une information provenant de l’Agence de Presse américaine UPI (United Press International).  Le 29 avril, au journal de 20 h sur A2, le journaliste annonce que, « selon une source américaine, il y aurait plus de 2 000 morts ». Et c’est ce chiffre qui va circuler pendant plusieurs jours alors que les soviétiques annoncent 2 morts. Deux jours plus tard, le 1er mai, le journaliste annonce le nombre de 2 morts et il ajoute et plusieurs centaines de blessés !

Bilan immédiat : Le nombre de victimes est bien de 2, après les premiers jours, et au total de 4, deux semaines plus tard et non pas de 2 000 !

Ce chiffre est étonnamment faible pour une telle catastrophe. Mais c’est normal.Car contrairement à ce que pense le grand public, le risque à craindre d’une centrale n’est pas l’explosion mais les rejets radioactifs. Les rejets radioactifs ne tuent pas immédiatement sauf à des doses énormes (ce qui est le cas des pompiers qui sont intervenus sans connaître la nature de l’explosion). Néanmoins ce chiffre va augmenter dans les mois à venir. A savoir avec les morts parmi les pompiers qui sont intervenus sans équipement pour éteindre le feu dès le 1er jour et les liquidateurs et opérateurs, qui ont pris des doses importantes, vont alourdir ce bilan. Il y aussi la population environnante. Pour celle qui est restée quelles sont les conséquences ?

La question que je me suis posée est quel est le bilan total 20 ans ou 30 ans après. Où peut-on trouver un chiffre fiable ? J’ai donc cherché les chiffres. Cela va être un peu long, vous pouvez allez directement à la conclusion, si vous n’aimez pas les chiffres …

Pour les experts du nucléaire, à fin 1986 le nombre total de victimes est de 31. C’est ce chiffre que retient Pierre dans son livre « Nucléaire Pas de Panique », paru en  1997. Il mentionne le bilan à court terme de 31 morts et 200 à 300 personnes gravement irradiées.

20 ans après, en 2006, le chiffre est de  50 morts et une estimation de 5 000 décès supplémentaires imputables au rayonnement, chiffres officiels de l’AIEA (Agence Internationale pour l’Energie Atomique).  Mais des ONG comme Greenpeace annonce 200 000 décès en 2006 puis 900 000 décès quelques années plus tard !
Qui croire ?
Pour y voir clair, j’ai repris les chiffres alarmistes,  par exemple extrait du documentaire « Tchernobyl, hommage aux liquidateurs » et je les ai comparés à ceux données par l’AIEA, l’OMS et d’autres organismes officiels :
– 50 morts dans les premiers mois semble un chiffre sur lequel tout le monde s’accorde.
– Ensuite cela diffère. Trois populations sont mentionnées :

  1. Les liquidateurs
  2. Les personnes restées dans les zones contaminées
  3. Et parmi ces personnes les enfants.

1/ Liquidateurs (dans lesquels j’inclus les mineurs qui ont creusé une galerie pendant trois semaines pour atteindre le réacteur)
Nombre de personnes : 500 000 ou 600 000. Les « alarmistes » disent que sur les 500 000 liquidateurs, 20 ans après, 20 000 sont morts, soit 4%,  affirme le documentaire de 2006, et 200 000 sont invalides. Ce même documentaire affirme que sur les 10 000 mineurs, 2 500 mineurs sont morts à moins de 40 ans, soit 25 %. Pour les instances officiels (AIEA, ONU, OMS), il est difficile d’établir un chiffre. Ceux-ci estiment un nombre global de décès supplémentaires, toutes catégories de population confondues (liquidateurs et population proche),  sur la base d’une règle issue de l’expérience d’Hiroshima et Nagasaki, voir ci-dessous.
2/ Population qui est restée vivre sur la zone contaminée, aucun chiffre n’est disponible. Les spécialistes nucléaires disent que l’impact sur les cancers est difficile à établir. Le chiffre de 5 000 décès  est annoncé, basé sur l’expérience Hiroshima et Nagasaki. Je retiens aussi le chiffre de 10 000 décès supplémentaires (avérés ou à venir) annoncé par Elisabeth CARDIS du CICR (Centre International de Recherche sur le Cancer) pour une population totale de 6 millions de personnes incluant les liquidateurs. A titre de comparaison, l’impact d’Hiroshima et Nagasaki sur le nombre de morts de la population par cancers est estimé à 2 000 entre 1950 et 2000.
3/ Les enfants : il y a des chiffres. Le nombre de cancers de la thyroide et les décès qui peuvent en suivre sont suivis. Le nombre de cancers a été multiplié d’un facteur important (x 80), il y a eu 4 000 cancers (au lieu de 50) et 15 décès supplémentaires sont imputables. Ces cancers auraient pu être évités si toute la population avait pu recevoir de l’iode en temps voulu, dit wikipedia.

Bilan total : je garde le chiffre de 200 000 à 900 000 pour les alarmistes. Pour les organismes officiels, le total max est de 10 065 dont 10 000 de décès dus à des cancers avérés ou à venir.

Nombre de décès dus à Tchernobyl (estimés 20 ans après) Alarmistes (ONG anti-nucléaires) Organismes officiels
Morts rapidement après la catastrophe 50 50
Chez les liquidateurs 17 500 (sur 490 000) Estimé 5 000 ou 10 000 décès supplémentaires par cancers induits par les radiations (sur une population de 6 millions de personnes yc les liquidateurs)
Parmi les mineurs 2 500 (sur 10 000)
Population restée dans les zones contaminées 180 000 (*)? – calcul par différence avec le chiffre de 200 000
Enfants dans les zones contaminées 15 15
Total : Estimé
200 000 à 900 000 (Greenpeace et autres)
Estimé
5 065 à 10 065 (l’AIEA, l’OMS, le CIRC…)

(*) Si on veut être logique avec le chiffre total de Greenpeace, c’est 180 000 morts dus à Tchernobyl dans la population vivant sur les zones contaminées.

En conclusion, on peut être sûr qu’il y a 65 morts avérés et ensuite c’est une estimation et libre à vous de croire une version ou une autre : 5 000 à 10 000 ou 200 000 voire 900 000. Ce qui est sûr c’est que le chiffre est difficile voire impossible à prouver.

Autre question : y-a-t-il eu plus d’enfants anormaux suite à Tchernobyl ?

Sur ce sujet aussi, les camps s’affrontent et les chiffres annoncés peuvent varier énormément. 10 000 malformations chez les nouveaux-nés suite à Tchernobyl (en 25 ou 30 ans ?) sont annoncées par Angelika Claussen, une médecin allemande de l’IPPNW (International Physicians for the Prevention of Nuclear War). Sujet complexe car les malformations peuvent venir d’autres causes. Je vous conseille une conférence très éclairante sur le sujet, qui relate le résultat de l’étude des naissances dans une région d’Ukraine,  voir la rubrique « pour en savoir plus » en bas de la page. Il me semble clair que l’environnement joue que cela soit l’alcool, les radiations, … le foetus étant très sensible.

Pour en savoir plus sur les conséquences sanitaires, Wikipedia

Désinformation sur le nuage en France ?

Dans un contexte marqué par la peur des conséquences sur la population, une accusation de désinformation va être lancée les semaines qui suivent contre le Professeur Pellerin, médecin directeur du SCPRI, au sujet du nuage. Ce dernier est accusé d’avoir minoré voir masqué les données sur les radiations, ce qui est résumé ainsi « le nuage s’est arrêté à la frontière ! ». Cette accusation aboutit à une plainte contre X en 2001 et une mise en examen du professeur Pellerin, mise en examen qu’il a par ailleurs souhaitée pour pouvoir se défendre.

Les faits : la télévision va montrer l’évolution des masses de nuage. Or les premiers jours les nuages sont montrés comme allant vers l’Est et le Nord et donc « épargnant » la France. Le 30 avril, l’animatrice météo parle d’un anti-cyclone qui « bloquerait » les nuages radioactifs. M. Pellerin est rassurant. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir concernant la nourriture ou le lait. Les Français peuvent consommer les produits alimentaires. Mais la réalité est plus complexe, il faut distinguer nuage et panache … La réalité est qu’une branche du panache de Tchernobyl est passée sur le Midi de la France et est détectée le 30 avril après-midi. Dans la nuit, une autre branche est détectée dans l’Est de la France. Le SCPRI en informe l’Agence France Presse (par télex, le mail n’existait pas !).  La nouvelle est reprise par les médias le 1er mai et reprend le télex « légère hausse de la radioactivité de l’air, non significative pour la santé publique, dans le Sud Est de la France« .

Ni M. Pellerin ni aucun représentant des services de radioprotection n’ont prononcé la phrase « le nuage s’est arrêté à la frontière ».  Cette phrase provient du titre d’un l’article du Canard enchaîné, très critique sur la communication faite par les organes officiels, qui restera dans les mémoires. En 1999, soit 3 ans après, Noël MAMERE attribue de nouveau de manière ironique ces propos au professeur Pellerin.

Cette polémique donnera lieu à une procédure judiciaire contre M. Pierre Pellerin.

En 2005, une lettre ouverte est envoyée au président de la République. Elle est signée de prestigieux hommes scientifiques. Parmi eux, Georges Charpak et … Pierre Tanguy. Cette lettre défend le Professeur Pellerin contre les accusations d’avoir volontairement minoré et cherché à dissimuler les risques sur la population française.

[ms_document url= »http://pierretanguy.fr/wp-content/uploads/2016/05/Lettre_J.Chirac_Pr.Pellerin.pdf » width= »600″ height= »800″ responsive= »yes » viewer= »google » class= » » id= » »][/ms_document]

Pierre Pellerin est innocenté en 2011, 10 ans après l’ouverture de la procédure judiciaire. Il meurt le 3 mars 2013. La cour d’appel a jugé que la catastrophe nucléaire de Tchernobyl n’a pas eu de conséquence sur la France. C’est aussi ce que pensait Pierre Tanguy, et que même en mangeant des canards sauvages, on ne risquait rien. Pour les Canards sauvages, nous n’avons pas encore trouvé la vidéo de Pierre qui en parle.  Dans la rubrique « Pour en savoir plus » ci-dessous, vous trouverez une vidéo qui explique la pollution radioactive en France due à Tchernobyl. Vous comprendrez ce qu’est une tâche de léopard dans le domaine de la contamination radioactive.

Partie 2 – Les habitants des zones contaminées et le programme ETHOS

J’en arrive à ce que j’ai découvert pendant cette modeste enquête sur les traces de Tchernobyl et de mon père. Vous avez peut-être vu le reportage d’Arte « Tchernobyl-Fukushima : vivre avec », qui a été diffusé le 26 avril sur la chaîne franco-allemande. Si vous ne l’avez pas vu, il est intéressant. Ce reportage témoigne d’une expérience faite dans les villages dit faiblement contaminés de Biélorussie et qui sert de référence pour Fukushima. Les habitants mentionnent « les Français » qui leur ont appris à vivre avec.  L’histoire est la suivante. 10 ans après la catastrophe, les habitants qui vivaient sur ces territoires n’avaient aucun moyen de contrôler la radioactivité autour d’eux et celle qu’ils ingéraient. Ils ne maîtrisaient rien. D’où une anxiété terrible, notamment pour leurs enfants. Une équipe de français, dans le cadre d’un programme européen intitulé ETHOS, est alors intervenue pendant 5 ans, soit de 1996 à 2001, dans plusieurs villages. Ci-dessous le descriptif du projet.

Le projet européen ETHOS avait pour but d’améliorer durablement les conditions de vie des habitants des villages dont la vie quotidienne a été fortement affectée par la présence à long terme de contamination radioactive à la suite de l’accident de Tchernobyl. Il s’agissait d’une nouvelle démarche pluridisciplinaire basée sur une implication forte de la population dans l’évaluation et la gestion du risque radiologique en concertation avec les autorités locales, régionales et nationales et des experts biélorusses.

Ce qui est frappant dans ce documentaire, c’est la reconnaissance des habitants envers « les Français ». Pour comprendre la démarche participative et d’appropriation par les habitants, aller sur le site ETHOS.

En allant chercher des informations sur les participants au projet, j’ai noté que l’équipe de Français comprenait Jacques LOCHARD du CEPN (Centre Etude pour la Protection Nucléaire), Gilles HERIARD-DUBREUIL, Gilles LE CARDINAL, enseignant à l’UTC.

J’ai découvert  avec surprise que Pierre TANGUY avait été impliqué indirectement. En effet Jacques LOCHARD mentionne que c’est Pierre, directeur du CEPN à cette époque, qui l’invite à témoigner à un colloque Cindyniques et qui le met ainsi en contact avec Gilles HERIARD-DUBREUIL. Ce projet, réalisé par  MM. LOCHARD, HERIARD-DUBREUIL et CARDINAL a changé fondamentalement le rapport de l’expert à la population : partager la connaissance est la finalité. Je vous recopie ci-dessous un extrait du témoignage de Jacques LOCHARD , cf  intégralité sur le site de l’ASN.

Un grand bouleversement

« En 1990, le CEPN est sollicité par la Commission Européenne pour réaliser, dans le cadre du projet AIEA, une analyse coûts-bénéfices du relogement des populations en périphérie de la zone d’exclusion des 30 km. C’est à cette occasion que je me rends, pour la première fois, dans les territoires contaminés. Pendant deux jours, en juillet 1990, je visite des villages en Ukraine et je rencontre des habitants, des professionnels et des autorités locales.

Un court séjour, mais qui marque un tournant dans mon parcours professionnel de radioprotectionniste. Je me suis trouvé très déstabilisé. J’arrivais avec tout mon bagage théorique d’expert de la radioprotection et la réalité à laquelle je me trouvais confronté n’avait pas grand-chose à voir avec ce que j’avais pu imaginer depuis mon bureau.

Quelques mois plus tard, Monsieur Pierre Tanguy, alors Président du CEPN et responsable de la sûreté nucléaire à EDF, m’invite à apporter mon témoignage sur cette situation post-accidentelle au colloque Cindyniques à Nice. C’est à cette occasion que j’ai fait la connaissance de Gilles Hériard-Dubreuil ».

Les ressorts de mon engagement

« Avec le recul, si j’essaie d’analyser la nature de mon engagement personnel, j’ai l’impression d’avoir évolué d’une attitude de compassion à l’égard des populations des territoires contaminés à une forme de solidarité, à mesure que je prenais conscience que ce qui était en jeu, bien au-delà des aspects techniques, c’était finalement la dignité des personnes.

Quant à mon engagement professionnel en tant que radioprotectionniste, mon expérience de plus de 15 années dans les territoires contaminés par l’accident de Tchernobyl m’enjoint, comme un devoir, d’adopter une attitude de vigilance, de porter témoignage aussi et de tirer des leçons pour nous-mêmes sur la gestion d’une situation post-accidentelle ».

Ceci est la fin de cette première partie « la loyauté de la parole ».  Cette recherche/enquête m’a permis de mieux comprendre l’attitude de mon père, son apport et les difficultés inhérentes à la situation.

Je conclurai avec une phrase qui provient du travail de Gilles Le Cardinal, participant dans ce projet ETHOS. L’intégralité de son article est ici  : « La confiance au fondement de la société » (2006). Cette réflexion est postérieure au travail de Pierre TANGUY, qui était en retraite en 1994 mais résonne, je trouve, dans la continuité de ce qu’il a toujours fait.

Au premier étage, la loyauté de la parole : ce qui est dit est vrai, l’engagement et la promesse seront tenus. Cela se traduit concrètement par le non-mensonge, qui n’est pas la transparence, cette dernière étant source de violence. Au second étage, nous atteignons le niveau de la confiance dans la prise de risque, l’alliance passée avec l’autre pour la réalisation d’un projet complexe et risqué qui ne réussira que grâce à la non-trahison des règles définies ensemble.  Gilles Cardinal

Je vous invite également à lire la biographie écrite par Pierre sur sa carrière. Dans les commentaires, il mentionne ce qui l’a animé pendant sa carrière.

Fin de la partie 1.
Une  Partie 2  est prévue « Répercussions de Tchernobyl sur la sûreté des centrales nucléaires françaises par Pierre Tanguy » – Publication à venir.

Vous pouvez bien sûr contribuer à améliorer cet article en participant dans les commentaires ou en envoyant un mail à Isabelle. 

Pour en savoir plus sur la démarche ETHOS :

Pour en savoir plus  sur la radioactivité en France : voir cette vidéo provenant d’un colloque organisé par le CEA le 15 mars 2016, « Tchernobyl 30 ans après ». Vous en saurez plus sur la contamination en France et vous saurez si pouvez manger des champignons et du gibier ….

Pour en savoir plus sur les conséquences de Tchernobyl sur les malformations en Ukraine : Conférence de W. Wertelecki, 12 mars 2013
M. Wertelecki est un pédiatre américain qui a mené une étude sur le registre des naissances en Ukraine. Il établit un  lien entre l’environnement, les pratiques des femmes dans la région Polésie d’Ukraine et les malformations congénitales.

 

Enregistrer

Pour commenter